• Piccolo Greenland
    Ibro Hasanovic
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Piccolo Greenland-Panorama 14

  • DESCRIPTION

    Depuis la deuxième moitié du XXe siècle, on assiste à une forte croissance du nombre des États par fragmentation politique. Ibro Hasanović, lui, lance l’idée de fonder un État indépendant sur un immense iceberg détaché d’un glacier du pôle Nord... Piccolo Greenland est une œuvre réticulaire composée d’objets de natures très différentes : une vidéo, des photographies, une création sonore, un site internet. D’emblée, il est entendu ici que la question n’est pas du strict ressort de la science politique car il n’est nulle part fait mention d’un peuple, d’un gouvernement ou d’institutions. De cet État on ne connaît que le territoire, celui d’une île, hostile et stérile par nature, voguant à vue dans les eaux internationales. À grand renfort de chiffres et de graphiques, un écran – relayé par un site internet – diffuse en temps réel la position et les données météorologiques de cet État. Autant d’instruments de mesure qui rappellent sans cesse que nous ne contrôlons rien de cette île, ni les intempéries qu’elle subit, ni son déplacement ou son inexorable dissolution dans l’océan Arctique. Sublimant ces données statistiques en les associant à des sons naturels, l’artiste en livre un paysage sonore évolutif qui s’écrit ainsi avec l’histoire de l’île. Au-delà de l’aventure humaine, la conquête d’un territoire est aussi une affaire d’images symboliques. Utilisée comme une preuve, la photographie a maintes fois représenté l’homme plantant un drapeau. À travers la figure du pionnier, ces images ont toujours contribué à souder et fortifier une communauté, à définir les contours d’une identité collective. En jouant de l’habituelle mise en scène de cette imagerie, Ibro Hasanović introduit le doute dans ses autoportraits en héros. Il maintient ainsi la troublante tension que le vraisemblable instille entre la fiction et la réalité. L’œuvre nous immerge dans un monde à la poésie radicale, brute. Au plus profond du brouillard, l’œil entend la cloche quand l’oreille voit le claquement du drapeau. À la dérive de l’île semble répondre l’errance de l’homme perdu, ne sachant où planter son étendard sur ce territoire dénué d’horizon. Dans une ultime et désespérée tentative d’existence au cœur de ce vide où tout se vaut, l’ambivalence du rapport de l’homme à cette terre promise, rêvée mais ingrate, s’exprime par le geste rageur avec lequel il en prend possession. Olivier Rignault, 2012